Prière pour ce temps présent
Le confinement général modifie notre perception du temps…
Voici la prière préparée pour le mois d’avril par Tristan, magistrat à Lyon.
Le désarroi qu’elle exprime rejoint certainement celui de tous les acteurs dans le monde de la justice : aumôniers, familles de détenus, CPIP, formateurs etc… coupés de contact direct avec les personnes incarcérées et inquiets pour elles ; personnels de surveillance sous pression ; magistrats, avocats obligés de surseoir à des décisions, chargés d’associations et de lieux d’accueil où se bousculent les demandes affolées…
Nous pouvons donc nous confier les uns aux autres ; et peut-être aussi partager ce qui « désaltère notre espérance » (mots du poète René Char) en ces jours difficiles. Car, s’il n’y a plus de célébrations dans nos églises, sauf des funérailles rapides, l’Esprit continue d’irriguer nos cœurs et de nous inspirer les mots et gestes qui conviennent. Nous répercuterons ce que vous voudrez bien envoyer pour maintenir vive l’espérance de notre réseau, en ces jours qui nous conduisent à Pâques. Et nous pourrons chanter, comme le psalmiste « Tu m’as répondu » ! (psaume 21).
« Si l’on a pu, à l’occasion d’autre prière, confier au Seigneur nos questions sur la légitimité de la justice des hommes, que Jésus oppose souvent à la justice de Dieu, c’est maintenant la question de la permanence de la justice qui se pose, face à la contagion du virus et au confinement décrété.
C’est la question que se posent les personnels confinés et placés en autorisation d’absence, pour toutes les raisons légales -maladie, enfants en âge scolaire-, les personnels en perspective de télétravail durant plusieurs semaines alors qu’il s’agit normalement d’une modalité ponctuelle de l’exercice des missions.
C’est aussi la question que se posent l’ensemble des ouvriers de la justice, placés dans une situation où seuls les cas urgents sont traités, avec tout l’arbitraire qui préside à l’attribution de ce caractère.
Chacun éprouve de la douleur : les victimes voient leur dossier repoussé sans perspective, les personnes poursuivies sont jugées sans comparution physique, les personnes condamnées ne sont plus reçues par les services.
Nous sommes ébranlés au fond de nous-mêmes, par cette situation inédite, brutale et incertaine dans sa durée. S’ajoute à cette sidération la crainte d’une reprise à venir surchargée et chaotique.
Et pour nous chrétiens, s’ajoute enfin la suspension des offices et des processions, par lesquels à travers les siècles nous demandions l’intercession de la Vierge Marie et des saints auprès du Père.
Laissons-nous interpeller par ces événements inouïs. Que m’enseignent-ils ? Quel est le message de Dieu notre Père ?
Tu nous as promis Seigneur : « Je vais t’instruire, te montrer la route à suivre, te conseiller, veiller sur toi » (Ps 31).
Comme dans la prière communautaire, nous redisons « Dieu, viens à mon aide, Seigneur, à notre secours » (issue du Ps 70)
« Seigneur, que ta justice me conduise » (Ps 5) dans l’exercice de ma mission de justice. »