Présentation de Christian, Assistant de l’ESCR, lors de la fête régionale de la communauté Provence, Méditerranée, Corse, le 13 avril 2024 à La Castille
« Nous reconnaissons que la mission de l’un est une partie de la mission de toute la communauté »
C’est cette affirmation qui nous vient de l’Assemblée Mondiale de la CVX à Amiens que mes compagnes et compagnon membres de l’ESCR m’ont demandé de travailler, non pas que je sois capable d’en donner quelque explication, je n’étais pas dans la tête de ceux qui l’ont écrite et je n’en connais pas l’historique. Il s’agit simplement pour moi aujourd’hui de vous partager quels repères spirituels ont pu m’aider à entendre cette affirmation et peut-être tenter de la faire mienne.
Bien sûr je ne vais proposer que des éclairages. Aucun des éléments que je vais évoquer ne colle, ne correspond à ce que nous vivons aujourd’hui ce ne sont que des chemins qui peuvent nous aider à apprivoiser cette affirmation que la Communauté Mondiale nous demande de faire nôtre.
Nous pourrions dans un premier temps, comme nous l’avons fait ce matin dans notre temps de prière, nous arrêter sur la contemplation de l’incarnation. Revoir bien sur la décision commune de la sainte Trinité et le Fils accomplissant une mission qui est celle des trois personnes divines : « sauver le genre humain ». Mais pour aller plus loin c’est la formule des moines théopaschites qui m’est revenue à l’esprit : « Un de la trinité a souffert dans sa chair ». A jamais l’un de la Trinité porte les marques de la Passion (pensons que c’est par ces marques qu’il laissera Thomas le reconnaître), à jamais la mission du Fils est celle de la Trinité qui en conserve la marque. La mission décidée par tous est accomplie par le Fils et les blessures du Fils affectent à jamais la Trinité elle-même, la mission de l’un vient affecter la réalité du « tout ».
Une autre image qui m’est venue et qui court tout au long du premier testament est celle d’un Dieu qui se choisit un peuple. Peuple souvent infidèle avec lequel Dieu ne cesse de vouloir restaurer son alliance. Et si à l’intérieur de ce peuple certains sont choisis pour une tâche, pour une mission précise, c’est le peuple dans son entier que cette mission affecte. La mission du prophète va permettre au peuple de donner corps à la réalité qu’il se doit de refléter, peut-être peut-on dire à la mission qu’il se doit d’accomplir : être le peuple de l’Alliance.
Nous pourrions pour cela nous référer au livre de l’Exode, voir Moïse appelé pour conduire le peuple d’Israël, voir Aaron prendre la part de cette tâche, entendre les paroles de Dieu revenant comme un leitmotiv : « Le Seigneur appela Moïse et lui dit : voici ce que tu déclareras aux enfants d’Israël » – Ex 19,3b. Et ainsi en est-il bien souvent de la façon qu’à Dieu de s’adresser aux prophètes.
Troisième image dans l’évangile de Marc au chapitre 6. Nous sommes juste avant la première multiplication des pains et Marc nous dit : « Les apôtres revinrent auprès de Jésus et lui racontèrent tout ce qu’ils avaient fait et enseigné.
D’abord ces apôtres étaient partis deux par deux, la mission n’étaient pas affaire d’un solitaire, il y avait déjà là une paire et plus tard le livre des Actes nous redira l’importance du caractère communautaire de cette mission. Et ce jour-là les apôtres partagent à Jésus le vécu de leur mission.
Comment ne pas faire le lien avec ce qui nous est proposé de vivre en CVX ? Partager lors de nos réunions de communauté locale la relecture de nos vies et notamment de ces lieux que nous pouvons percevoir comme ceux où le Seigneur nous appelle. Et ce partage est certainement le lieu où la mission propre de chacun peut commencer à devenir une part de la mission de tous. Et elle peut le devenir encore un peu plus si l’appel a été discerné en communauté, si j’attends de mes compagnons de communauté locale soutien et évaluation, s’ils ont été participants de l’envoi en mission…
Et toujours dans le Nouveau testament n’oublions pas le récit de Pentecôte. C’est lorsque les disciples sont réunis que l’Esprit leur est donné et voici qu’on peut alors passer de « [disciples] réunis ensemble dans un même lieu » – traduction BJ – à des apôtres capables de s’adresser à chacun dans sa propre langue ; et je dirais certainement aussi dans sa propre identité, dans le profond de ce qu’il est. Ne peut- on pas voir là quelque analogie avec ce qui nous est donné de vivre dans nos communautés : être ensemble réunis, enfants du Père à qui l’Esprit a été donné en plénitude, ayant à cœur de chercher et trouver Dieu en toute en chose et de se disperser pour être au service du monde avec toutes les femmes et les hommes de bonne volonté (cf PG).
Dernier éclairage les mots du P Pedro Arrupe s.j. lors de la congrégation générale où il a été élu supérieur général de la compagnie de Jésus :
“L’union doit avoir des liens … compatibles avec la dispersion, bien plus, donnant un sens à la dispersion : ad intra la charité et l’amour mutuel intensément sentis et actifs ; ad extra la participation à la mission globale par la mission personnelle de chacun.”
Mince! pouvons-nous dire. Nous n’avons encore rien inventé. Ou au contraire, quel bonheur que ce vécu qui nous est proposé soit déjà présent dans cette famille ignatienne qui est la nôtre. Il existe bien dans notre famille spirituelle une cohérence dans la pensée, dans la vision de la présence au monde quel que soit notre état de vie, cela est heureux.
C’est donc sur cette vision positive que je termine ce propos. Ces quelques mots n’ont rien d’une vérité absolue. Ils représentent le chemin par lequel l’Esprit m’a conduit à m’approprier les paroles de notre assemblée mondiale et je voulais simplement vous les partager avec simplicité comme ce que mon service me demande d’être : un simple compagnon parmi d’autres.
Christian, Assistant de l’ESCR Provence Méditerranée Corse